Lire Lisières c’est entrer dans un monde où l’ordinaire et l’extraordinaire se confondent. C’est accepter de voir des
ombres furtives, des souvenirs se matérialiser, un horizon trouble où des êtres
semblent sortir de nulle part. En un mot c’est être dans un ailleurs.
C’est avec talent que Marianne Desroziers entraîne son lecteur dans cet
univers tout en ambiguïté. Très friande, je me ne suis pas laissé prier.
Marianne a su dans ces courtes nouvelles plonger le lecteur dans une
atmosphère, parfois lourde et angoissante, tout en laissant à celui-ci le choix
d’interprétation et c’est ce que j’ai apprécié dans ce recueil.
J’ai particulièrement aimé « La couverture rouge », texte à la
sensibilité à fleur de peau, porte ouverte à cette possibilité de se jouer de
la mort. Le texte est court comparé aux autres mais je pense qu’il est le cœur
de ce recueil.
J’ai moins aimé La disparition de la photo. Je lui trouve quelques
faiblesses. Je crois que plus court, avec moins de détails sur les souvenirs de
cette femme, ce texte aurait gagné en force. En fait, j’ai deviné très tôt,
trop tôt. L’effet de surprise n’était pas au rendez-vous.
Le Vice enfin puni est une petite récréation dans cette lecture. En quelques
pages, le lecteur est invité à faire une pause ludique, le temps de se remettre
avant de s’asseoir sur cette fameuse couverture rouge.
Marianne crée, dans un style simple et clair, usant de monologues
intérieurs, une ambiance et suggère sans dire. Il y a, à mon avis, une petite
faiblesse quant à la voix de ce livre. D’une histoire à l’autre, j’ai eu le
sentiment d’entendre la même. C’est un petit reproche qu’on pourrait lui faire.
La boîte, le fauteuil sont des objets que nous retrouvons au moins déjà dans
deux nouvelles.
Mais, au moment même où j’écris cette phrase, je me dis que peut-être cette
voix unique est voulue.
Ne serait-ce pas un seul être qui, à l’instar du personnage du Vice enfin
puni qui nous parle ?
Tout est possible. A nous d’interpréter.