Les penchants du roseau : Qu’espériez-vous lorsque vous avez
entamé la rédaction de LISIERES et pensez vous, aujourd'hui, être arrivé
là où vous désiriez ?
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Marianne Desroziers : Les
nouvelles qui composent lisières n'ont pas été écrites dans le but de
composer un jour un recueil. Cependant, quand j'ai réuni ces six
nouvelles pour en faire Lisières, j'ai voulu qu'il se dégage de
l'ensemble une cohérence en terme d’atmosphère. Le mystère et
l’ambiguïté sont des dénominateurs communs de ces textes, tout comme la
présence des esprits. Quant au fait d'être complètement satisfaite de ce
que j'écris, il me semble que c'est impossible pour tout écrivain. Si
on a l'impression d'être arrivé exactement là ou on le voulait on
n'écrirait plus.
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De manière générale, quel regard portez-vous sur vos propres écrits ?
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Je
suis en général relativement sévère avec ma production littéraire. Ce
n'est qu'une fois que le texte à été écrit, réécrit, corrige, élagué
(car réécrire c'est souvent couper ou simplifier) que je le propose à
l’éditeur. Une fois mon texte publié, j'ai envie de le défendre, même
s'il est fatalement imparfait.
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Partage, introspection, détente, exercice douloureux... quel est votre rapport à l'écriture ?
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L'écriture
n'est ni une pure détente (ce n'est pas un simple loisir), encore moins
une douleur (je ne suis pas masochiste). Disons que c'est une recherche
permanente, mêlant introspection et échappées belles vers des
territoires imaginaires.
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Écrire pour vous, c'est
n'importe où, n'importe quand, lorsque le besoin se fait sentir ou, au
contraire, une discipline stricte qui demande un certain cérémonial ?
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Écrire
est aujourd'hui mon activité quotidienne principale. Sans parler de
cérémonial, l'ideal est d'être chez moi, devant mon ordinateur avec mon
compagnon qui peint non loin de la : cela crée une émulation propice à
la création artistique.
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Le fait d'être publiée a-t'il changé votre manière d'aborder l'écriture ?
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En
effet, être publiée cela change beaucoup de choses : c'est une étape
supplémentaire dans mon affirmation en tant qu'écrivain. Les choses sont
maintenant claires pour moi : j'écris pour être publiée. Un texte
littéraire n'existe que parce qu'il est lu : c'est le lecteur qui fait
le livre et le premier lecteur c'est l'éditeur. De mon point de vue, le
regard de l'éditeur sur le texte est primordial et je suis très heureuse
de publier mon premier livre chez Christian Domec qui respecte les
textes et les auteurs qu'il choisit de publier et a une haute opinion de
l'objet livre.
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Pour vous le lecteur est-il un éternel étranger ou un compagnon essentiel ?
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Comme
je viens de le dire, le lecteur est celui sans qui la littérature
n'existerait pas. Pour l'instant, le lecteur m'est encore un peu
étranger mais j’espère en faire un compagnon de vie.
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Si
on parle d'avenir, quels thèmes aimeriez-vous aborder dans vos
prochains écrits ? Parallèlement, quels sujets vous sentez-vous
incapable de traiter ?
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J'écris actuellement un roman
sur la création artistique et notamment la peinture, thème qui sera je
pense de plus en plus présent dans ma production littéraire à venir.
J'écris aussi un recueil de nouvelles sur le thème de la peau. C'est
peut-être prétentieux de ma part mais je ne vois pas quels sujets
seraient inabordables. Il y a des thèmes qui m'intéressent plus que
d'autres mais je me laisse entière liberté de traiter tous les thèmes,
même les plus tabous, comme je l'ai déjà fait dans certaines nouvelles
qui dynamitaient le modèle de la famille nucléaire bourgeoise (
"Familicide" et "Rose bonbon et gris anthracite").
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Pour
conclure, le sempiternel et "s'il n'en restait qu'une"... Une phrase
qui vous a marqué au fer rouge (de vous, d'un autre, d'hier,
d'aujourd'hui...)
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Tout comme les plus belles photos
sont celles que l'on n'a pas prises ( cf "La disparition de la photo"),
je crois que les mots les plus marquants sont ceux que l'on n'a pas
dits. D'un point de vue plus littéraire, certaines phrases me hantent,
notamment celles de mes deux auteurs de prédilection, deux femmes
admirables, l'eau et le feu : Virginia Woolf et Marina
Tsvetaeva.Impossible de n'en citer qu'une!
(Interview publiée sur la page Facebook des Penchants du Roseau)