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Articles

Affichage des articles du mai, 2012

"Marie-Josée", extrait de "Lisières"

« (...) Marie-Josée. Une courte vie : quelques objets. Laissés en vrac dans un petit deux pièces à deux pas de la place de la Victoire. Enfance dorée dans un milieu bourgeois, à Versailles, piano, danse, cours de dessin, s’est même crue artiste un temps avant de se découvrir d’autres ambitions. On la dit jolie, elle se sait attirante et en joue jusqu’à s’y faire prendre un soir de juin dans l’appartement d’un inconnu, quai des Chartrons, où elle était venue faire un casting pour une pub, soi-disant. Elle n’eut pas le temps de boire sa coupe de champagne qu’elle sentit le froid de la lame s’enfonçant dans la chair, la chaleur de son sang quitter son corps. Et sa vie finit comme ça : un soir, les quais, la Garonne qui l’emporta dans ses flots boueux. (...) » extrait de Marie-Josée in Lisières de Marianne Desroziers à paraître le 1er juin 2012.

"Depuis les terrasses", extrait de "Lisières"

« (...) Petit à petit, les gens se sont lassés, ils ont trouvé une autre plage avec moins de vent, plus de place pour étaler les serviettes, des tables en bois pour les pique-niques, des tourniquets et des toboggans pour les enfants. La plage est redevenue quasi déserte, mais elle n’a plus cet aspect sauvage de mes premières vacances. Elle a l’air d’un vieux parc d’attractions désaffecté, une femme d’âge mûr que son mari... C’est drôle cette envie de pleurer qui me vient tout le temps depuis cette terrasse, pourtant il n’y a pas de vent. On dirait qu’il va pleuvoir, tant mieux : rien de tel qu’une bonne averse pour fertiliser les sols, purifier les âmes, assainir les cœurs. Je me souviens d’un temps où j’avais peur de ce vide immense qui prend aux tripes et ne vous lâche pas avant plusieurs heures, parfois plusieurs jours. Aujourd’hui, je ne le crains plus, je le recherche même parfois. Oui, certaines choses ont changé et il me faudrait faire un tri dans mes souvenirs. De toute façon,

"Le bar d'acajou", extrait de "Lisières"

« (...) Raïmi avala un œuf dur en deux bouchées, puis se rinça le gosier avec le fond de son verre. Les quelques hommes qui restaient encore sur les banquettes en peluche violette du bistrot – retardant le moment de rentrer chez eux et d’y retrouver femmes et enfants s’étaient agglutinés autour de nous, écoutant son récit dans un état presque second. Dans mon esprit leurs visages se confondaient avec ceux des clandestins ; ils avaient ce regard d’une extrême fixité des gens prêts à tout, des fous et des morts. Assise derrière son bar, la serveuse aux yeux cernés attendait, elle aussi, la suite. — Continue ! Qu’est-ce qui s’est passé ? (...) » extrait de Le Bar d'acajou in Lisières de Marianne Desroziers à paraître le 1er juin 2012.

"La couverture rouge", extrait de "Lisières"

 (...) Une fois la porte refermée derrière nous, il y eut un long silence gêné, lourd de sens, puis il se mit à parler comme s’il n’avait jamais parlé à un autre être humain. De tout ; de sa mère ; de sa maladie ; de ses rêves encore debout ; de ses projets presque avortés mais qui se refusaient à mourir ; des livres qu’il avait lus ; de ceux qu’il voulait lire ; du jazz de la Nouvelle-Orléans ; de Faulkner ; de Monteverdi. Je me tus, je le regardais, je l’écoutais, avec avidité ; il me posa beaucoup de questions auxquelles je répondis en termes sibyllins, tout en ayant l’impression d’en avoir déjà trop dit, comme s’il entendait entre mes mots tout ce que je ne disais pas. Ensemble, nous regardions tomber la pluie par la minuscule fenêtre, nos visages s’effleurant ; soudain, je souris à un de ses mots d’esprit, il tourna la tête pour mieux voir mon sourire et j’en fus bouleversée, ce fut comme si une flèche empoisonnée et brûlante me transperçait le cœur. La pluie s’arrêta et nous fûme

"La disparition de la photo", extrait de "Lisières"

« (...) il y a les souvenirs sans photo pour les matérialiser, les authentifier : toutes ces pies sur le cerisier de mes grands-parents le premier jour de l’été 1962 ; ce truc bizarre que j’ai vu dans le ciel avec mon frère, en rentrant du cinéma, un soir d’hiver en 1971 ; ces paysages magnifiques du Vercors, qui m’ont éblouie à une période où plus grand-chose ne le pouvait ; et tous ces regards croisés par hasard qui m’ont bouleversée, les géographies intimes des corps – un grain de beauté derrière l’oreille, une cicatrice au poignet droit, la forme d’un nombril. Heureusement, tous ces moments de bonheur fugaces, peut-être les meilleurs souvenirs finalement, sont absents des photos et des négatifs, reproductibles à l’infini sur du papier mat ou brillant. Je veux les garder pour moi, je n’ai pas envie qu’ils se retrouvent dans les tiroirs de Chloé, dans l’album familial, ou dans ma jolie boîte en tissu au milieu des autres qui jaunissent cruellement. (...) » extrait de La Disparitio

Le vice enfin puni, extrait de "Lisières"

« (...) Tel Le Passe-muraille de Marcel Aymé, je traversai la couverture mais au lieu de me retrouver sur le fauteuil comme je m’y attendais, j’entrai de plain-pied dans une couverture : De sang-froid. Récit véridique d’un meurtre multiple et de ses conséquences de Truman Capote, traduit de l’anglais par Raymond Girard, NRF, Gallimard, collection Du Monde entier , première édition de 1966. Merde déjà lundi ! La femme de ménage était venue et avait trouvé le livre sur le fauteuil. Avec sa manie de tout ranger – je lui ai dit mille fois de ne pas toucher aux livres – elle l’a placé machinalement dans la bibliothèque. Impossible de sortir en se faufilant entre deux livres : ils étaient trop serrés, depuis toujours, une manie. Je ne supportais pas de voir un espace entre deux livres dans ma bibliothèque, ça me chiffonnait ces béances : si la nature a horreur du vide, pourquoi pas la culture ? Les plaines à blé de Holcomb, ce n’est pas vraiment l’endroit rêvé pour passer ses vacances, ce

Quatrième de couverture de "Lisières"

« Lecteur, suis-moi sur ce chemin, à la lisière, même – et surtout – si tu ne sais pas où il te mènera. La lecture est un risque à prendre... Ceci est une invitation au voyage, au périple le long de la frontière, de toutes les frontières. Celles poreuses entre la réalité et l'illusion, le banal et l'extraordinaire, le monde des vivants et celui des morts. Une jeune fille disparue, laissant la porte ouverte à toutes les hypothèses, une photo de famille recélant bien des secrets, une couverture rouge faisant resurgir le souvenir d'un homme aimé quelques instants, une rencontre improbable dans une station balnéaire à l'abandon, une lectrice perdue dans ses livres, un garde-frontière aux prises avec de drôles de créatures... Voilà ce qui t'attend dans ces six nouvelles que j'ai voulues emplies de mystère, d'étrangeté et d'ambiguïté, te laissant, cher lecteur, ta part d'interprétation. »

Dissonances numéro 22

Je suis au sommaire du numéro 22 de la revue littéraire "Dissonances" sur le thème des rituels avec une nouvelle intitulée "Dimanche et". Vous pourrez y lire également les contributions de Yannick Torlini, Ariane Gelinas, Frédérick Houdaer, Christophe Esnault, Lionel Fondeville et bien d'autres... N'oublions pas de préciser que le numéro est entièrement illustré par Mehryl Levisse. La liste des librairies où vous pourrez acheter cette superbe revue pour la modique somme de 5 euros ainsi que l'adresse où la commander directement est disponible là

La couverture de "Lisières"

La couverture de "Lisières", mon premier livre, qui sera publié le 1er juin aux éditions Les Penchants du Roseau (les commandes se font sur le site de l'éditeur) : L'illustration de couverture est de William Mathieu, artiste peintre dont je vous encourage à visiter le site ici .