Quarante grammes, c’est le
poids de la nouvelle de Marianne Desroziers, L’enfance crue, publiée aux éditions Lunatique dans la collection
36e deux sous. Quarante grammes et vingt-six pages dans lesquels l’auteur
nous offre un condensé d’émotions et nous fait glisser d’une réalité morne à un
univers fantastique.
Ligie a vite compris qu’elle n’était
pas comme les autres enfants. Elle est petite pour son âge, ses pieds ne
touchent pas terre quand elle est assise sur une chaise. Elle est frêle avec de
longs, de très longs cheveux blonds qu’elle tresse tous les matins. Elle aime l’insolite,
les cabinets de curiosité, l’alchimie, la cryptozoologie, la musique
médiévale, le cinéma muet allemand. Le grille-pain, la télévision, le réveil se
détournent sous son regard de leur usage habituel et les êtres humains se
métamorphosent. Et tous les soirs ou presque, Ligie se retrouve dans la forêt
sauvage en fixant le lapin blanc du réveil.
Découverte grâce à son recueil
de nouvelles, Lisières, Marianne Desroziers
nous livre une histoire puissante. Comme à son habitude, l’auteur aime s’inspirer
de l’univers d’un de ses auteurs préféré, ici l’univers fantastique de Jorge Luis
Borges. En quelques phrases, elle nous
bouleverse, nous fait rêver à cet univers fantastique où l’âme de Ligie se
réfugie pour oublier la triste réalité. Fable naïve sur une fillette rêveuse,
conte cruel d’une enfant qui cherche à échapper à sa tristesse, la nouvelle de
Marianne Desroziers nous laisse rêveur, un peu triste aussi lorsque l’on pense
à Ligie et aux autres sirènes de la forêt sauvage. Triste aussi parce que vingt-six
pages c’est trop court et qu’on n’en aurait voulu plus. A quand un roman ?
Julie
Lecanu (pour le site Le Salon Littéraire)